Au lendemain d’une release party à succès au Rex, Asdek sort enfin le premier EP qu’il teasait depuis quelques mois. « you should have closed the door before you left », puisque c’est le titre de ce projet, risque d’étonner plus d’un fan du français. Si vous ne connaissiez le membre de Contrebande qu’à travers ses sets explosifs fortement teintés Bass House, l’écoute de cet EP va vous emmener dans un tout autre univers. Si vous suivez suffisamment assidûment Asdek pour connaître notamment ses fameuses « Lost Tape« , ce premier EP va vous faire découvrir encore davantage l’éclectisme de sa palette artistique.
Artiste aussi bien musical que graphique, lui qui a longtemps été graphic designer et qui a une formation dans ce domaine : cet EP lui aura permis d’aller jusqu’au bout de sa démarche artistique en liant la musique à l’image, en travaillant une direction artistique visuelle léchée en accord avec l’univers de l’EP.
La programmation de sa release party était d’ailleurs également totalement à son image. Des camarades de la nouvelle génération House/Bass House française avec Basstrick, les Loge21, Saverio ou encore Upsilone. Une touche de rap avec la présence de STO, artiste lillois avec qui il a sorti le morceau « HEB » l’an dernier. Une pointe de Drum’n’bass avec The Caracal Project. Mais aussi la présence surprise d’Ava Mind, pour son côté streamer Twitch.
Un moment aussi important de sa carrière ne pouvait pas non plus se faire sans son ami Vladimir Cauchemar. Il nous expliquait l’an dernier en interview l’importance de ce dernier dans sa carrière. On le retrouve d’ailleurs sur cet EP, assez logiquement.
Ce premier EP conceptuel s’inscrit dans la lignée de ses « Lost Tape ». On pourrait d’ailleurs presque le prendre comme une « Lost Tape Pt.3 ». Toujours une ambiance très cinématographique assez captivante, à contre-courant des ambiances plus club qu’il est également capable de produire. A l’écoute du projet, on sent immédiatement qu’il l’a construit comme une histoire à écouter d’une traite.
Sur fond d’une voix off féminine tout au long de l’EP, on découvre une histoire d’amour qui tombe vite dans un engrenage qui va irrémédiablement vers la rupture, comme une noyade. Les titres sont d’ailleurs assez évocateurs, de « my love for you » à « made of tears », en passant par « what am i doing wrong », « idgaf » et « water ». Asdek développe ainsi une allégorie de la vie sentimentale et de la rupture.
L’évolution de l’ambiance à l’écoute de l’EP est saisissante. Après une introduction où la voix off pose les bases de l’histoire d’amour, on découvre en effet « my love for you », premier single sorti il y a quelques mois. Une atmosphère qui sonne joyeuse, des sonorités claires et épurées, mais on sent déjà que l’histoire d’amour est en train de plonger (« i gave up on my love for you », « give me something new »).
Le clip illustre assez bien le lead du morceau, où Asdek joue astucieusement avec des vocal chops, comme une course folle pour échapper à des pensées négatives. Le « nightmare interlude » vient clairement annoncer la couleur et le basculement vers des ambiances plus sombres.
Musicalement, « what am i doing wrong » s’inscrit dans la continuité de « my love for you », avec un côté tech house encore plus minimaliste et épuré. Sur « idgaf », on retrouve par contre des pointes du côté bass de Asdek, avec une bassline qui reprend plus de place, mais toujours un tempo très lent et un gros travail sur le vocal et le songwriting.
When two people are drowning together, sometimes the only way out is to become the thing that kills you : water
Asdek & Vladimir Cauchemar sur le site « water »
Sur « water », la collaboration avec Vladimir Cauchemar, malgré des paroles assez tristes, on retrouve une vibe un peu plus lumineuse et enjouée. Pour un titre à la teinte housy agréable qui pourrait finalement assez bien rentrer dans un DJ set tel quel. « made of tears » vient lui conclure l’EP comme une ballade mélancolique actant la rupture avec ces douces notes de piano. Avant une conclusion définitive sur des notes assez graves, toujours dans une rythmique très downtempo et des vocal chops en accord.
Au final, « you should have closed the door before you left » est un projet aussi déroutant que captivant. On n’a clairement pas l’habitude d’entendre ce genre de démarches sur la scène électronique actuelle. Et c’est ce qui rend ce projet si rafraîchissant. Ne l’écoutez pas dans une optique de clubbing et de recherche d’ambiance festive. Mais posez vous le soir, à observer la nuit par la fenêtre, et laissez vous emporter dans l’histoire dans laquelle Asdek cherche à vous emmener. On tire en tout cas notre chapeau à l’artiste, qui est clairement allé au bout de sa volonté artistique sur ce projet, sans chercher à rentrer dans les codes actuels pour s’assurer un succès commercial.