Apparu mystérieusement sur la scène en 2015, Malaa est depuis devenu une figure incontournable de la scène électronique. A travers d’abord des sorties sur Confession, puis ses Illegal Mixtapes, son projet No Redemption avec Tchami et, évidemment, sa place au sein du crew Pardon My French, il s’est petit à petit construit une fan base très solide à travers le monde. Ne se contentant pas de « simplement » mettre un masque comme beaucoup d’artistes cachés, il a pris le temps de se forger une vraie identité et tout un univers autour de son image de « gangster bling bling ». Matérialisé évidemment par son incontournable cagoule, il n’a pas hésité à pousser son concept assez loin avec par exemple sa vraie fausse arrestation en 2019 en club. Avant un long silence jusqu’à sa « libération » sur la scène de l’Ultra Miami en tenue de prisonnier.
Un signe distinctif avec sa cagoule, vite devenu un signe de ralliement pour sa fan base. Un univers travaillé et atypique pour accompagner ses sets. Mais aussi un style musical assez propre avec sa « G-House », sorte de Bass House plus brute et froide mêlée à des influences Hip Hop pour une atmosphère une nouvelle fois très gangster. Voilà les ingrédients qui ont fait de Malaa un artiste qui compte aujourd’hui et qui se produit sur toutes les scènes de la planète. Tout en n’oubliant pas la France, c’est à souligner. C’est en effet l’un des rares « gros » artistes de chez nous à revenir chaque année faire un nombre de dates important dans l’Hexagone.
Alors qu’il n’a plus grand chose à prouver en live, il était maintenant temps pour lui de se tester sur le format album. Et de voir comment il pouvait décliner son univers si spécial sur tout un opus. C’est dès le mois de mai cette année qu’il avait enfin annoncé ce projet tant attendu, finalement titré « Don Malaa« . Un projet ambitieux qui a déjà reçu une promotion d’envergure, l’homme cagoulé pouvant fièrement dire qu’il a été affiché sur les iconiques écrans de Time Square.
De notre côté, il nous avait déjà mis à l’eau à la bouche en dévoilant la tracklist de son album. On pouvait déjà découvrir avec plaisir que pas moins de 10 morceaux exclusifs allaient être disponibles, les 3 premiers singles déjà sortis et l’intro mis à part. Mais la liste des collaborateurs mettait également l’eau à la bouche. Avec déjà les attendus DJ Snake et Tchami, mais aussi la semi-surprise Tony Romera, très proche du crew PMF et déjà présent sur l’album de Tchami. Plus surprenant mais tout aussi alléchant, l’excellent A-Trak, mais aussi une belle sélection de rappeurs talentueux, Fivio Foreign, Yung Felix, Jadakiss et, s’il vous plait, la légende du Wu Tang Clan, M.Ghostface Killah.

Dès l’intro, Malaa nous pose en tout cas dans l’ambiance du projet. On a vite la sensation d’être dans une ruelle sombre de New-York. Une voix apeurée sortant d’une radio de la police, l’atmosphère est froide et angoissante, on sait qu’on va naviguer dans un projet aux sonorités brutes et agressives. Point qui se vérifie dès le premier morceau « Outcast » avec un Fivio Foreign à l’aise comme s’il jouait à domicile, lui qui est né à New-York. Son refrain sonne d’ailleurs comme un véritable hymne à Malaa et on imagine totalement l’homme cagoulé en faire un intro edit pour démarrer ses sets avec à l’avenir. Dès le début de l’album, on a déjà en tout cas l’un de nos morceaux coup-de-cœur de l’album. Entre le refrain ultra énergique et fédérateur de Fivio Foreign, l’intro sur une Trap assez légère et ce drop électro qui explose tout en jouant sur une distorsion, on tient déjà l’un des gros bangers du projet.
La tracklist enchaine ensuite avec les 3 singles déjà sortis, « Hypnotic« , « Deep« et « How It Is« . Le dernier est d’ailleurs déjà un des morceaux marquants de l’année. Massivement playlisté depuis plusieurs mois, il a reçu des supports allant jusqu’à des artistes comme Tiësto, Martin Garrix ou la Swedish House Mafia, pourtant plutôt éloignés de l’univers de Malaa. Il faut dire que ce sample vocal « That’s how it is that’s how it goes » est terriblement addictif et vous rentre immédiatement dans la tête. Un sample tiré d’ailleurs du morceau « Luv 4 Dem Gangsta’z » de Eazy-E, leader du groupe NWA. L’un des pères du Gangsta Rap devait forcément se retrouver sur un album comme celui de Malaa. Un Malaa qui montre une nouvelle fois au passage son goût pour les samples tirés du rap US, comme depuis ses débuts avec, dès son premier gros succès ‘Notorious‘, un vocal emprunté au regretté Biggy.


Un goût prononcé pour le rap US marqué également sur le titre ‘The Game Is Dead‘. Il emprunte cette fois la voix d’une autre légende new yorkaise, M. Erick Sermon, avec sa punchline « no creativity in the game no more« , tirée de son titre « Relentless« . On sent d’ailleurs sur ce morceau la collaboration avec Tony Romera. La production rappelle son récent succès ‘Raw‘ avec sa vibe Tech House très épurée. Niveau collaborations hexagonales, on doit évidemment passer sur sa nouvelle collaboration avec Tchami, ‘Discipline‘.
La collaboration entre les deux rappelle évidemment le projet No Redemption, qui nous avait offert plusieurs gros titres très punchy et puissants, calibrés pour les clubs et les festivals. Ici les deux amis nous étonnent avec un titre à l’ambiance au début presque breakbeat, avant qu’une grosse basse très Bass House vienne nous rappeler à qui on a affaire. Un titre à écouter les yeux fermés avec son casque à la maison pour bien s’en imprégner. Il fait d’ailleurs suite sur l’album à un autre titre étonnant de la part de Malaa, « Toxic Dream« . Sonnant comme une courte interlude au milieu du projet, le morceau est très lent, dans un style Electro Downtempo rappelant évidemment Rezz (avec qui il a déjà collaboré sur ‘Criminals‘). Une pause captivante assez bienvenue après un début en fanfare de l’album.
On l’a dit plus haut, Malaa semble être un grand amateur de la scène rap US, mais plus particulièrement de la scène East Coast. Il a en effet réussi à inviter deux nouvelles grosses têtes d’affiches de la côte Est américaine sur son projet. Avec Jadakiss déjà, membre éminent des Lox et des Ruff Ryders. Mais aussi Ghostface Killah, légende parmi les légendes du Wu Tang Clan. Le premier pose sur « No Panic« , et entendre Jadakiss sur une production aussi électro est une expérience ! C’est presque frustrant de ne l’entendre « que » sur l’intro et les breaks et on aurait aimé le voir s’essayer à poser sur une prod aussi rapide. La fusion Electro/Hip Hop fonctionne en tout cas. Et encore plus sur « Die Hard« , notre gros coup de cœur de l’album. Ghostface Killah vient poser sur une production commune entre Malaa et A-Trak, et dès l’intro on ne sait pas trop où on tombe mais on adore !
Malaa avait annoncé que ça allait surprendre, et c’est totalement le cas. Arrivant en conclusion de l’album, il fait plutôt bien écho à l’intro car on se sent vite comme dans une BO de film pour une scène dans les rues sombres de New-York, à bord d’une voiture. Une ambiance Electro French Touch à la Kavinsky avec un Ghostface Killah en forme tout le long du morceau, la fusion est assez inédite et on valide totalement ! Un morceau bien représentatif de l’album : Malaa se fait plaisir en invitant ses influences tout en jonglant entre les styles. D’une House légère portée par une voix soul avec « True Friends » à un tempo plus relevé avec une ambiance presque tribale sur « Gangsta« , en passant par une electro plus percutante et explosive sur l’énervée « Police » et une vibe plus vintage sur « 7/55« , Malaa navigue au gré de ses envies. On sent qu’il ne s’est pas fixé de limites, tout en essayant de rester cohérent avec son univers qu’il a développé au fil des années.
Après plusieurs années à se construire une place singulière sur la scène, Malaa livre ainsi un premier album solide. Un projet que l’on sent travaillé et qui a pris le temps d’être maturé pour ne pas proposer que du Malaa « classique ». On y retrouve avec plaisir ses habituels collaborateurs que sont DJ Snake et Tchami, même si on n’aurait pas dit non à une apparition de Mercer également. Mais il surprend également avec des collaborations d’envergure avec des grands noms du rap US tout en s’aventurant sur des styles où on ne l’avait pas encore vu. Ajouter à tout ça le fait qu’il propose une dizaine de titres inédits là où de trop nombreux albums sortent avec assez peu de nouveautés, on tient là un album très solide qui ravira les fans de l’homme cagoulé tout en s’ouvrant à de nouveaux horizons.
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