Flume signe son grand retour avec son troisième album studio intitulé « Palaces »

Partiellement débuté à Coachella le mois dernier, le troisième opus de Flume intitulé « Palaces » voit finalement le jour, son premier album en six ans. Retranché dans son Australie natale depuis le début de la pandémie où il a pu retrouver un rythme de vie apaisé, entouré de ses plantes quelque part dans le sud-est du pays, loin de l’agitation de Los Angeles, de l’enchainement des tournées et du lot d’alcool et d’anxiété qui accompagnent celles-ci, Flume a pu paisiblement retrouver sa joie de vivre et boucler un troisième album ayant la lourde tâche de succéder à l’ouragan « Skin ». Le Grammy Award du meilleur album électronique avait ainsi pris la tournure d’un véritable tremplin positionnant Harley Streten comme une figure de proue de sa scène musicale à l’échelle internationale.

« Avant les shows, je prenais quelques verres, pendant les show et après ceux-ci également, parce que j’étais constamment anxieux. Je finissais par boire à chaque concert, cinq jours par semaine, sur une tournée de trois mois. Je me sentais mal. J’étais déprimé parce que j’étais constamment seul dans les chambres d’hôtel. Je ne voulais plus faire de tournée. Je suis allé voir un psychologue et je me suis dit, je déteste mon travail.

Flume pour The Guardian

Un geek de studio installé au milieu de la nature, c’est l’exotique contraste que l’on retrouve dans la direction visuelle d’exception concoctée par le duo Streten – Zawada, tous deux voisins et complices depuis que le second a signé avec brio l’artwork et l’univers de « Skin ». Le voilà de nouveau aux commandes, cette-fois pour « Palaces », ayant entre temps animé la mixtape « Hi This Is Flume », avec un sublime court-métrage qui dessinait déjà les contours sonores et visuels du nouvel album. Exit la voiture, c’est désormais en moto que se déplace Flume dans un univers singulier qui mixe technologie et flore luxuriante.

Cet ensemble visuel abouti permet d’offrir un caractère compact aux 13 titres de l’opus, bien moins cohérents pour leur part comme le reconnait volontiers Flume.

Ce n’est pas comme si j’avais tout fait en trois mois en Islande. J’ai produit l’album sur plusieurs années dans différents endroits du monde, avec différentes personnes également. Je n’ai pas l’impression d’avoir un thème cohérent particulièrement fort, mis à part l’ADN de la production.

Flume pour Billboard

Assez décousu, l’album semble vouloir faire le pont entre les recettes du songwriting Pop de « Skin » et les éléments de sound-design plus progressistes entrevus dans la récente Mixtape.

Si « Escape », « Palaces », « Hollow » ou « I Can’t Tell » semblent donc tenir du second album de l’australien, la fraicheur consécutive à la mixtape est à mettre au crédit des productions teintées d’inspirations Hyperpop/PC Music construites autour des voix d’Oklou, Caroline Polachek et Virgen Maria ou d’une co-production signée Danny L Harle dans un registre s’apparentant à un hommage non dissimulé à Sophie, bien qu’on puisse également citer Arca ou AG Cook. Sur « Love Light », Flume se permet par ailleurs un retour aux sonorités désormais un peu old-school de son premier album, tandis que la rythmique Baile Funk de « Say Nothing » se propose comme une tentative de hit un peu isolée au milieu d’une sélection moins accessible.

Bien que le travail du natif de Sydney soit comme toujours de haute volée, ce patchwork de sons piochés dans des références déjà entrevues dans sa discographie peine à reproduire la claque que ses deux premiers albums avaient infligés. Quand « Skin » trouvait à nos yeux un équilibre parfait, formant un aboutissement entre l’écriture Pop progressivement insufflée par le producteur et les textures instrumentales uniques puisées dans le courant wonky de la Future Bass des Rustie, Hudson Mohawke, Wave Racer ou autres Lido que Flume avait su personnaliser depuis plusieurs années pour les amener à un niveau encore jamais entendu, « Palaces » semble essayer de forcer un mariage infructueux entre cette formule à succès et un nouvel assaisonnement granulaire, déconstruit, glitchy et plus radical, qui avait marqué les esprits dans la Mixtape mais apporte peu dans ce format crossover.

« Parfois sur certains sons de ‘Skin’, je me suis retrouvé à penser, ‘est-ce que c’est encore ma chanson?’ J’avais le sentiment que ma production été reléguée en arrière-plan, mais avec la mixtape et le nouvel album, j’ai l’impression qu’il y a un très bon équilibre entre les deux. »

Flume pour DJ Mag

En continuant de s’approprier ce style avant-gardiste plébiscité par les critiques spécialisées et l’implémentant à son ADN sonore, Flume se fait surement plaisir mais prend aussi un virage qui risque de décevoir ses auditeurs les plus exigeants en proposant un entre deux qui manque un poil de fraicheur, où l’« Innocence » a laissé place à un « Only Fans » pas autant assumé qu’à l’occasion de la Mixtape, offrant une sorte d’album 2.5 transitoire qui nous laisse légèrement sur notre faim.

« Palaces » est disponible chez Future Classic