Album Release : Jody Wisternoff se livre à nous avec ‘Nightwhisper’

Nous évoquons souvent les figures de proue d’Anjunadeep, comme Dusky, Ben Böhmer ou encore Tinlicker, sans s’intéresser aux piliers, aux meubles du label, dont fait partie Jody Wisternoff. L’ancien finaliste 1986 du DMC (à 13 ans), ex-membre du duo Way Out West est en effet une figure de la scène rave UK, qui a depuis parcouru du chemin, et abouti à la première sortie d’un album en 2012 : Trails We Blaze. Depuis, Jody travaille avec Anjunadeep, pour lequel il sélectionne notamment les tracks qui feront partie de la compilation annuelle.

Mais au-delà de cela, Jody Wisternoff est également un producteur accompli qui laisse une grande place à l’expression de ses émotions et expériences personnelles dans ses compositions. C’est donc 8 années après son premier LP que le British dévoile son deuxième projet sur sa deuxième maison : Nightwhisperer, album qu’il décrit comme « très personnel », car inspiré du décès de son père en 2019. Celui-ci a alors décidé de revenir aux choses plus simples :

« Il s’agissait d’un temps de conflit pour mes émotions… Et j’ai appris à apprécier les choses simples, comme je ne l’ai jamais fait avant, le tout en me questionnant sur l’aspect éphémère de la vie, suite au décès d’un membre de ma famille. Nightwhisper est une tentative de trouver l’équilibre et la paix dans ce voyage qu’est la vie. C’est une comptine personnelle, un appel aux choses simples. Ce n’est pas tous les jours possible, mais ça rassure de le faire ».

Avec une telle description, impossible de ne pas se plonger dans cette histoire, surtout si elle se fait en musique. Cela tombe bien, Anjunadeep dévoilait le 1er mai dernier le Continuous Mix dudit album :

Avant de s’intéresser à l’aspect musical, nous tenons à souligner la qualité des visuels qui accompagnent les morceaux, en ce qu’ils invitent à un véritable voyage avec des étendues et des jeux de couleurs réellement remarquables. Il s’agit d’une expérience visuelle que nous vous recommandons lors de l’écoute, d’où le placement du lien avant la critique.

Parlons désormais de l’album. Celui-ci commence avec Morning U, qui est une ballade introductive ô combien lyrique, qui monte crescendo et plante parfaitement le décor de ce que constituera Nightwhisper.

Le titre éponyme prend d’ailleurs la suite, et nous envoûte en fondant l’essentiel de la composition sur l’air fredonné par la vocale, notamment lors des breaks. Ce fredonnement, parlons-en, tant il est entêtant ! Il ne quittera pas votre esprit pendant quelques heures. Et pour que ce titre soit entièrement personnel, il fallait qu’intervienne son grand ami James Grant, lui aussi parmi les piliers d’Anjunadeep et comparse attitré de Jody. Nightwhisper fait donc transparaître l’essence même de l’album.

Passons à la suite ! Si Here To Stay et Emochine mettent un bon coup d’accélérateur au rythme de l’album avec l’apparition de rythmiques plus House, ils constituent une passerelle sympa pour le premier titre avec vocal de l’album. Lately, en featuring avec Rondo Mo enchaine, en étant un track Deep House des plus joyeux et planants, avec un soupçon supplémentaire de groove. On sent le changement d’ambiance directement, et on se surprend à la repasser plusieurs fois et à danser dessus.

C’est juste après qu’intervient Story Of Light. N’y allons pas par 4 chemins : c’est juste le meilleur track de l’album. Jody emploie des sonorités orientales de mandoline pour introduire le morceau, puis surgit un drop avec kick/horns d’une puissance incommensurable. La première impression qui nous vient à l’écoute de Story Of Light est que ce morceau aurait totalement pu être produit par les RÜFUS DU SOL ou Cassian, tant la vibe qui s’en dégage est similaire. Story Of Light est un morceau Progressive House, qui flirte avec la Trance, et qui vous sortira de votre canapé/chaise tant la production est un niveau au-dessus dans le genre actuellement.

Blue Space succède à cette pépite, et Jody refait appel à James Grant, ainsi qu’à Jinadu pour exprimer au mieux le ressenti que voulait faire passer Wisternoff : c’est-à-dire un sentiment amer, provoqué par l’onde de choc de la perte de son père. C’est donc une atmosphère mélancolique qui émane de la production, magnifiquement portée par la voix de Jinadu et la mélodie principale sur le drop.

Baisse de rythme nécessaire avec For Those We Knew, titre ô combien évocateur du mood global de Wisternoff lors de la composition de cet album. On revient sur un rythme Deep House plus lent, qui se concentre sur les sonorités et la musicalité, en témoigne ces accords au violon sublimes lors de l’entièreté du morceau. Et pour accompagner à la voix, nulle autre personne que Mimi Page, dont les performances vocales envoûtantes ne sont plus à faire depuis sa prestation sur « Lullaby » de Bassnectar. On ne change pas une équipe qui gagne : le titre nous emporte très, très haut, et creuse profond dans nos coeurs pour toucher nos cordes sensibles.

Jody Wisternoff nous surprend sur le track d’après : Something Real, en featuring avec Jinadu (encore une fois, décidément!), adopte une rythmique breakbeat qui dénote avec les premiers morceaux de l’album. Ce morceau semble amorcer la convalescence émotionnelle du producteur : tant d’optimisme et d’espoir ressortent des vibes du morceau. Un excellent morceau, qui va de pair avec Andromeda, qui adopte la même structure mais se révèle un peu plus mélodique que Something Real.

The Spark poursuit ce travail d’optimisme, et les premiers mots de Christian Burns l’indiquent. « Save Me With Your Life », le ton est donné, fini de faire de la place au spleen, voilà l’avènement du retour à la vie ! Et The Spark est assurément le titre le plus rythmé de l’album : plus il avance, plus on constate d’éléments adjoints, claps, snares, hi-hats. Et la performance vocale de Burns va tout autant crescendo en termes d’accompagnement de montée. Les frissons s’emparent de nous !

Reverie est un morceau Chill/Indie qui clôt l’album comme il se doit : un au revoir, lent et qui refuse la séparation. De nombreux instruments donnent un côté très orchestral à la composition, et signent la fin de ce voyage introspectif que nous proposait Jody Wisternoff.

Avec Nightwhisper, Jody Wisternoff propose un voyage au sein de son for intérieur et nous fait revivre son vécu récent, ainsi que le combat mené pour en sortir plus fort. Ce degré d’intimité est rare à voir dans l’industrie. Alors bravo, et merci, l’artiste.

Amine

Mino
Grooves endiablés et douceur mélodique rythment mes journées. Je passe également des disques avec l'équipe après les 39h.