News : Spotify boostera les artistes qui acceptent de recevoir moins de royalties

Alors que la grande majorité de l’industrie musicale souffre de la crise absolue qui secoue le secteur de l’événementiel, les artistes et leurs labels pourraient voir leurs revenus également amoindris chez Spotify. En effet, la plateforme suédoise a annoncé ce lundi 2 novembre plusieurs changements à venir dans sa manière d’effectuer des recommandations. Ces suggestions personnalisées que l’algorithme crée pour vous notamment via le système de « radio » ne seront désormais plus totalement automatisées.

Ainsi, Spotify permettra a certains artistes de décider des sons qu’ils souhaitent que l’algorithme recommande en priorité. Une fonctionnalité gratuite? Pas exactement, car ces derniers devront en échange accepter un taux de royalties plus faible lorsque leurs sons seront mis en avant par l’algorithme. Pour faire clair, Spotify propose le deal suivant : Vous serez plus écoutés mais vous toucherez moins d’argent.

Pour garantir que l’outil soit accessible aux artistes à tout stade de leur carrière, il ne nécessitera aucun budget initial. Au lieu de cela, les labels ou les titulaires de droits accepteront de recevoir un taux de royalties « promotionnel » lorsque les écoutes seront générées par ce service.

Voici comment Spotify personnalise vos recommandations

Une initiative qui a instantanément provoqué un tollé sur les réseaux sociaux de nombreux artistes. À l’heure où Spotify constitue une des principales sources de revenus pour beaucoup de musiciens, voir le géant du streaming profiter de sa position dominante pour exercer un chantage à la visibilité ne plait guère. L’artiste Braydon Stachel anticipe ainsi le fait que si tous les interprètes adhèrent à ce format, le « boost » proposé par Spotify s’appliquera à tout le monde, ce qui impliquera en fin de compte un retour à la case départ en terme de visibilité, avec pour seul changement… plus de revenus gardés par Spotify au détriment des artistes.

Si cette mesure résonne autant, c’est parce qu’elle s’inscrit dans un contexte qui semble se tendre d’années en années entre la plateforme et ses créateurs. Un site comme Bandcamp continue de se présenter comme une alternative aux géants du streaming tandis que les initiatives de DSP basés autour de la crypto fleurissent dernièrement à l’image de Audius Music.

La semaine dernière encore, l’anglais Flux Pavilion déplorait une loi du streaming qui ne profite pas aux artistes. Dans l’échange, son homologue canadien Vanic rappelle pour sa part que si Spotify rémunère peu, le service offre cependant une grande visibilité aux artistes, que ces derniers peuvent ensuite convertir en revenus (comme les shows notamment). Un constat véridique qui omet néanmoins le fait que les artistes n’ont pas attendu l’existence de Spotify pour se rendre visibles et générer des revenus parallèles aux royalties. Jusqu’à quel point ceux-ci sont-ils prêts à sacrifier leurs royalties en échange de visibilité?

Actif et souvent pertinent sur ce sujet, Thys du groupe hollandais Noisia résume la situation:

« Ne mordez pas la main qui vous nourrit. Mais pensez à quitter une relation toxique si la main abuse constamment de son pouvoir sur vous. Spotify qui annonce un système de pay to play est un énième gros « Va te faire foutre, tu es remplaçable » des institutions envers les créateurs indépendants. Parfois cependant, je me dis qu’il y a une vérité là dedans. Peut-être qu’il y a tellement de musiciens prêts à payer pour poursuivre le rêve de gagner de l’argent, que les institutions seraient stupides de ne pas facturer aux artistes l’utilisation de leur plateforme, au lien de les payer pour leur travail. »

Spotify abuse-t-il de sa position ou y’a-t-il tout simplement trop de musiciens souhaitant vivre d’une musique qui n’a plus réellement de valeur propre à l’ère digitale? Parmi les millions de profils vérifiés sur Spotify, seuls ceux consentants aux plus gros sacrifices pourront à terme accéder au succès? Des questions peu évidentes que le contexte force bon nombre de créateurs à se poser.