Interview Exclusive : Draft répond aux questions de Guettapen

VERSION FRANÇAISE 

Artiste talentueux, auteur de plusieurs EPs parus sur différents labels avant d’arriver sur mau5trap, Liam Talon aka Draft est un créateur de sonorités, d’ambiances, et de grooves très surprenants. Et aujourd’hui, notre équipe a l’honneur de vous propose une interview exclusive avec le producteur anglais.

Pourquoi « Draft » ?

« Draft » a été créé quand j’ai commencé la production de musique. J’avais des maquettes de 1 ou 2 minutes que je ne finissais jamais. Quand je montrais à d’autres artistes, ils me disaient que mes ébauches étaient bonnes, mais incomplètes. Alors, mes projets étaient juste mes brouillons (ndlr : « brouillon » se traduit par « draft »). J’ai donc opté pour cet alias pour toujours me souvenir d’où je venais.

Comment définis-tu ton style ? Nous te voyons essayer plein de genres, mais tout en gardant un son assez récurrent… 

 Je n’ai pas un style particulier auquel je me cantonne. Ça démontrerait un manque d’originalité, ainsi qu’un esprit assez fermé. Mon style, pour moi, peut se définir par : « Qu’est ce que je veux entendre ? Comment veux-je l’entendre ? ». J’ai commencé par faire de la musique avant tout pour moi même, et personne d’autre. Je suis d’ailleurs très chanceux que beaucoup de gens puissent apprécier ce que je fais. Le premier morceau estampillé « Draft » était vraiment différent que ce que je fais actuellement, un jour je le montrerai peut-être. Je change souvent de genres parce que c’est une façon de progresser, et de continuer à intéresser les gens. Mes sons récurrents sont là grâce à des années d’attention et de traitements. Une personne qui écoute un de mes morceaux saura que cette track viendra de moi. Je préfère la musique qui sonne assez fort, large et acoustique, c’est mon choix. La plupart des producteurs de nos jours que j’entends, nous sortent des sons directement venus de packs de samples, ou ont un mix vraiment affreux et des mixages distordus. C’est personnellement quelque chose que j’essaye d’éviter continuellement. 

Pourquoi as-tu choisi de développer tout un tas de genres à la fois au lieu de te concentrer sur une voie unique ?

 Comme je l’ai évoqué, c’est que ça devient ennuyeux. Ça montre un esprit limité et une très courte durée de vie. Si tu montres dès le début de ta carrière à quel point tu es diversifié, l’attrait du public augmente, et il est susceptible de s’intéresser d’avantage à toi. J’ai choisi de me mettre dans la position où je peux composer tout ce que je veux. Sans aucune limite. Et très peu peuvent se le permettre. Ça veut aussi dire que je peux écrire pour plein d’autres artistes, voire même chanteurs.

Draft 1 

Que veux-tu transmettre avec ta musique ? Un message, une émotion, les deux ? Que veux-tu que les gens saisissent quand ils se retrouvent à écouter du Draft ?

 Les deux. Messages et émotions. Une de mes nouvelles tracks contient une intro que j’ai écrite pendant que je regardais « Fantasia » de Disney. J’ai voulu donc retranscrire cette émotion en son. « From Inside » fut un EP avec énormément d’émotions dedans. Chaque morceau a été écrit en pensant à une de mes expériences de vie. J’ai de la musique prête à sortir qui est extrêmement dark, très très dark. Car je peux être une personne très obscure, parfois. J’ai aussi de très joyeuses et lumineuses tracks  parce que… Why not ?

Que faisais-tu avant d’être Draft ? Est-ce que ton passé a influencé la création de tes morceaux ?

 J’ai commencé à écrire de la musique durant mes années à l’université (que j’ai abandonnée). Après, tandis que j’avais un job à Londres, je produisais de 9 heures à 3 heures du matin. Absolument tous les soirs. Mais en faisant ça, en tenant compte de mon travail, mon travail acharné m’a permis de me concentrer à 100% sur la production et d’être signé. Rien de ce que j’ai fait dans le monde professionnel n’a influencé ma musique, bien que mes expériences de vie l’ont fait. Par exemple, mon premier EP « TheEndofTheBeginning » contient l’artwork d’une fille avec laquelle j’ai passé une nuit assez chaotique. Le reste est classé X…

Tu montres à travers ta chaîne YouTube le making-of de tes tracks, mais as-tu un workflow, une routine ?

 J’essaye d’éviter d’en avoir une, en fait. Il y a une chose à laquelle je fais vraiment gaffe, c’est à ne jamais réutiliser les même drums/samples d’un morceau à l’autre, en essayant d’être original à chaque fois. Certaines tracks commencent avec ma guitare. Ou mon synthé avec quelques accords. Ou avec simplement un groove avec une atmosphère particulière. Les rares fois où je commence dans une « bad mood », je ne fais que du bruit ou je joue avec des samples ambiants, et je me lance, peu importe vers où cela me mène. Les vidéos « Inside The Project » sont un moyen pour moi pour montrer pourquoi je fais tel ou tel choix, mais pas seulement comment je fais. Il y a beaucoup trop de focus sur « comment fait-on tel son ? » en musique électronique, et jamais de « pourquoi j’ai choisi ce son ? ». Je voulais changer cette façon de penser. 

Draft 3 

Tu as dit sur Twitter il y a quelques mois, tu avais eu pas mal de problèmes avec tes anciennes releases sur les anciens labels à cause de droits, peux-tu nous en dire plus ?

 En essayant de pas être poursuivi en justice, le label où j’ai signé mon premier contrat a en fait été inactif, a été pauvrement managé et de façon vraiment nulle. J’ai livré 3 EPs, qui représentent 11 tracks, pour être publié… Et ils n’en ont rien fait. J’essaye de ne pas regretter, mais je sais maintenant que si j’avais publié mes morceaux ailleurs, ils auraient mieux marché et m’auraient rapporté de l’argent. C’était un label qui était aux mains de gens de médias, pas de musique. 

Quelle est ta vision de la scène EDM ? Comment, selon toi, peut-elle s’améliorer ? Ou peut-elle même empirer ?

 La seule façon que l’EDM devienne meilleure, c’est de mourir. Honnêtement, j’écoute 3 ou 4 autres artistes (qui ne sont même pas issus de l’EDM …) et je pourrais me foutre à 99% des artistes avec lesquels je suis associé. Tout n’est plus que ventes, tendances, paillettes et autres confettis, qui ne sont, pour moi, aucunement associés à mon écriture musicale. Chaque idée n’est que du recyclé, des sonorités aux lumières. J’ai récemment écouté quelques releases récentes où la production était dégueulasse, avec un mixage et un mastering affreux, mais grâce aux facteurs marketing, les « artistes » font le tour du monde en engrangeant du fric. Ce dont la musique électronique a besoin, c’est de VRAIS fans de musique. Des fans qui réalisent qu’ils peuvent voyager avec la musique, et qui supportent les artistes en lesquels ils croient. Ne vous y méprenez pas, il n’y a pas de « famille », ni « communauté » ou « scène ». Tout n’est que marketing et business. « Ne jouez pas en équipe », dit le proverbe.

Un conseil à donner aux jeunes producteurs ? Et qu’aimerais-tu dire à nos lecteurs, afin de les « convaincre » de s’intéresser à ta musique ?

Écrivez la musique dans laquelle vous vous identifiez. Ne produisez jamais pour des raisons financières, ça viendra avec le temps. Ne produisez pas dans le seul but d’être applaudi, ça viendra avec le temps. Soyez originaux, soyez différents, soyez heureux et espérez. Sans espoir, vous n’y arriverez pas. Soyez fidèle avec votre propre son et cela sera payant. La plupart de la musique populaire qui est écoutée aujourd’hui ne le sera plus l’année prochaine. Assurez vous d’avoir une musique intemporelle. Cela m’a pris 6 ans pour être arrivé à mon niveau actuel, et je continue de le travailler. Il n’existe pas de succès qui se sont créés du jour au lendemain. Quelque chose pour convaincre vos lecteurs de s’intéresser à ma musique ? Facile : elle vient de mon âme. Besoin de plus ?

Plus d’infos sur Draft :

Draft 2

ENGLISH VERSION

Talented artist, author of some EPs published on different labels records before mau5trap, Liam Talon aka Draft is a sound design, atmospheres and surprising groove creator. And today, our team is honored to deliver to you an exclusive interview, with Draft.

Why  « Draft » ?

The Draft name was created when I first began writing music, I would have excellent 1-2 minute clips that were never finished. When I showed fellow artists, they would tell me they were great, but unfinished. So the projects were simply « Draft projects ». I opted to stick with it as a way to remember where I started

How do you define your style ? We see you trying many genres, but you have recurrent type of sounds …

I don’t have one style I always go for, that shows lack of originality and a one-dimensional output. My style, in my eyes, has always been ‘what I want to hear, how I want to hear it’. I began writing music for myself, no one else, I’m just fortunate that a lot of people have grown to like it. The very first Draft material was very different, one day I may show people. I always vary genres because that’s a way to progress, and it keeps listeners interested. My recurrent sounds are due to years of careful selection and processing, so if someone hears a track of mine, they know it’s mine. I prefer my music to sound big, wide and acoustic, it’s engaging. Most electronic producers I hear nowadays feature straight from sample packs, or have awful, loudly distorted mixdowns. That was something I will always avoid

Why do you choose to develop into many genres at the same time rather than in one particular way ?

As I said, it becomes boring. It shows a limited output, and a very short shelf-life. If you showcase early in your career how diverse you can be, audience perceptions increase, and they appreciate you more. I’ve worked myself into a position where I can write whatever I want without limitation, not many have that. It also means I get to write for a lot of other artists and singers

Draft 1 

What do you want to share with your music ? Messages, emotion or both ? What do you want from people who listen to a Draft track ?

Both emotion and messages. One of the new tracks features an intro that was created whilst watching Disney’s « Fantasia », I wanted that to convey sonically. « From Inside » was an EP full of emotion : each track came from an experience that I wrote the music on. I have some material waiting to be released that is very, very dark, because I can be a dark person at times. I also have some very happy, light-hearted music, because … why not ?

What did you do before being Draft ? Had it actually influenced the way that you create your music ?

I started writing music in my later years at University (where I dropped out), then whilst I was working a job in London City. I would write music from 9 PM until 3 AM every single day. By doing that, and putting that time in whilst having a job, my hard work enabled me to be signed and focus on music full time. Nothing I did in the working world contributed to my music, although the experiences I had during did. For example, my first self-released EP « TheEndofTheBeginning » featured artwork of a girl I shared a chaotic night with. X-rated, in fact…

You show on YouTube how you make tracks, but what’s your typical workflow, routine ?

I try to avoid a routine. One thing I am cautious of is not using the same drums/samples, and trying some new every time. Some tracks start with me and my guitar in my hand, or by messing with chords on a synth. Others start with a groove, or some start with an atmosphere. The odd few start when I’m in a dark mood, so it’s just ambient samples/noise, and I just run with whatever happens. The ‘Inside the Project’ videos were a means to show people why things were done, not just how. There’s too much focus in electronic music on HOW to make something, never asking why did you choose to do that. I wanted to change that

 

Draft 3

 You said on Twitter several months ago you had many issues due to labels and rights with you previous music. Can you tell us more about that ?

Carefully wording to avoid lawsuits, but the label I signed my first deal with were inactive, poorly managed and just generally bad. I’d written 3 EP’s, 11 tracks including some for publishing, and they got me nowhere. I try not to regret much, but I know if certain tracks had gone elsewhere, they would have done a lot better and earned me money. It was a record label owned by MEDIA people, not MUSIC people.

What’s your vision on current EDM scene ? In your opinion, how can it be better ? And could it be worst ?

It can only be better if it dies. I listen to maybe 3 or 4 other artists (who I don’t even classify as EDM), and couldn’t care for 99% of who else I’m associated with. Everything became about sales, gender and bright lights and gimmicks, none of the reasons I personally began writing music. Every idea is regurgitated, from audio to live show gimmicks of lights and headgear. I hear recent releases where the production is basically awful, the engineering is terrible, but because of « marketing » factors, the “artists” travel worldwide on tours earning big money. What’s needed is fans of electronic music to realize they’re being taken for a ride, and to support artists they truly believe in. Make no mistake, there is no “family”, “community” or “scene”, only marketing ploys to milk the cash-cow.  « Not a team player », as the saying goes.

 Any advices for young producer ? And what would you want to say to our readers, to « convince » them to jump into your music ?

Write music you truly believe in. Never write for financial reward. that will come with time. Never write for acclaim or approval from peers. That will come with time. Try new things, be different, have fun and have hope. Without hope, you have nothing. Stick to your own sound, and it’ll pay off. Most of the popular music you hear now won’t be remembered this time next year. Make sure your music is remembered. It took me over 6 years to get to the level I am now, and I’m still developing. There is no such thing as an “overnight success”. Something to convince your readers to jump into my music ? Easy : it comes from my soul. What more can you ask for ?

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